Article cpnm 005
GESTION DES ÉMOTIONS

> Lorsque Laura, 6 ans, rentre de l’école, elle se met à pleurer parce qu’un de ses amis ne veut plus jouer avec elle. Quelques minutes plus tard, elle se met en colère et crie que personne ne l’aime. Sa maman, démunie, tente de la consoler, mais rien ne semble apaiser la tempête émotionnelle de sa fille.
« Pourquoi est-elle si réactive ? », se demande-t-elle. « Comment puis-je l’aider à mieux gérer ce qu’elle ressent ? »
Cet article s’adresse aux parents qui font face à des enfants ayant du mal à réguler leurs émotions.
> Pourquoi certaines émotions débordent-elles ? Que se passe-t-il dans le cerveau de votre enfant lorsqu’il vit une frustration ou une colère ? Surtout, quelles stratégies concrètes pouvez-vous mettre en place pour l’aider à retrouver un équilibre émotionnel ?
Que se passe-t-il dans le cerveau de l’enfant ?
Explication :
Les émotions sont des réactions naturelles à notre environnement, mais chez les jeunes enfants, leur gestion est encore en développement. Le cerveau humain se construit par étapes, et la capacité à réguler ses émotions repose sur plusieurs parties clés du cerveau :
- Le système limbique, responsable des émotions, est pleinement actif dès la naissance.
- Le cortex préfrontal, qui aide à réguler ces émotions, ne commence à bien se développer que vers l’âge de 4 à 5 ans et ne termine sa maturation qu’à l’âge adulte.
> Cela signifie que les jeunes enfants ressentent intensément leurs émotions, mais n’ont pas encore les outils cognitifs pour les apaiser seuls. Ainsi, face à une frustration, un enfant peut réagir par une crise de colère ou de pleurs car son cerveau n’a pas encore appris à « freiner » ces réactions instinctives.
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Des recherches montrent que l’apprentissage de la régulation émotionnelle repose sur deux éléments essentiels :
- L’attachement sécurisant : Un enfant qui se sent compris et soutenu par ses parents est plus à même de développer des compétences de régulation émotionnelle.
- L’acquisition progressive de stratégies : Avec l’aide d’un adulte, l’enfant peut apprendre des techniques pour reconnaître ses émotions et les apaiser.
Maintenant que nous avons clarifié les bases neurologiques des émotions chez l’enfant, voyons concrètement comment ces mécanismes s’expriment dans le quotidien.
Les situations suivantes illustrent des difficultés émotionnelles courantes et les réponses adaptées que les parents peuvent mettre en œuvre.
Deux Exemples de Parcours pour Mieux Comprendre et Agir
Cas tirés de ma pratique clinique
*Les cas cliniques présentés sont fictifs et à titre d’illustration uniquement*
La crise de colère
Émilie, 4 ans, est en pleine crise parce que son papa lui a refusé un bonbon avant le dîner. Elle crie, se roule par terre et refuse de s’apaiser. Son papa, fatigué, se demande si il doit céder.
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- Analyse : Cette crise est une réaction normale à une frustration. L’enfant exprime son mécontentement car elle n’a pas encore appris à gérer cette émotion intense. Le rôle du parent est d’accompagner cette émotion sans nécessairement céder.
- Solution mise en place : Le papa d’Émilie décide d’appliquer une stratégie de validation émotionnelle. Il se met à la hauteur de sa fille et lui dit : « Je comprends que tu sois déçue. Tu voulais vraiment ce bonbon. Mais on le mangera après le dîner. » Cette validation permet à Émilie de se sentir entendue, ce qui aide à réduire la crise.
L’angoisse de séparation
Thomas, 7 ans, pleure chaque matin avant de partir à l’école, car il a peur de quitter sa maman. Il exprime des phrases comme : « Et si tu n’étais pas là quand je reviens ? »
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- Analyse : Son angoisse provient d’un manque de sécurité intérieure. Il a du mal à gérer l’émotion de peur liée à la séparation.
- Solution mise en place : Sa maman met en place un rituel de séparation positif. Chaque matin, elle lui donne un objet transitionnel (comme un bracelet, un bisou de rouge à lèvre sur un morceau de papier) et lui rappelle qu’elle pense à lui pendant la journée. Avec le temps, Thomas apprend à apaiser sa peur grâce à cette routine.
Ces exemples montrent que les réactions émotionnelles des enfants ne sont pas des caprices, mais des expressions légitimes de besoins non satisfaits.
Afin d’accompagner ces émotions de manière constructive, explorons ensemble des solutions pratiques et des stratégies que vous pouvez appliquer au quotidien.
Clefs pour aider son enfant à mieux gérer ses émotions

Valider les émotions de son enfant
L’une des erreurs les plus courantes est de minimiser ou rejeter les émotions de l’enfant en disant des phrases comme « Ce n’est rien » ou « Arrête de pleurer ». Au lieu de cela, adoptez une attitude d’écoute empathique :
- Dites : « Je vois que tu es très en colère. Veux-tu m’en parler ? »
- Évitez de dire : « Calme-toi tout de suite ! »
La validation de son émotion permet à l’enfant de se sentir compris et accepté dans son ressenti, ce qui est un premier pas vers l’apaisement.
Apprendre à nommer les émotions
Un enfant qui sait reconnaître ses émotions peut mieux les gérer. Vous pouvez utiliser des outils comme la « roue des émotions » ou des livres illustrés pour aider votre enfant à mettre des mots sur ce qu’il ressent.
- Exemple : « Je sais que tu aimerais aller au parc tout de suite, montre moi sur ta roue comment tu sens.”
Enseigner des techniques de respiration
La respiration profonde est un outil puissant pour calmer une émotion intense. Vous pouvez apprendre à votre enfant une technique simple :
- Inspirez par le nez pendant 3 secondes
- Expirez lentement par la bouche pendant 5 secondes
Pratiquez cet exercice avec lui lorsqu’il est calme, afin qu’il puisse l’utiliser pendant une crise.
Mettre en place des routines de décharge émotionnelle
Les enfants ont besoin de libérer leur énergie émotionnelle de manière saine. Encouragez les activités physiques ou créatives qui permettent cette décharge :
- Exemple : Sauter sur le trampoline, danser, faire des jeux de rôle, dessiner, déchirer du papier, crier dans un coussin, etc.
Utiliser les histoires et métaphores
Les histoires peuvent aider les enfants à comprendre leurs émotions de manière ludique.
Par exemple, vous pouvez leur raconter l’histoire d’un petit volcan qui apprend à contrôler ses éruptions.
Cultiver la régulation émotionnelle : un chemin vers l’équilibre et la sérénité
Accompagner un enfant dans la gestion de ses émotions demande du temps, de la patience et des outils adaptés.
En validant ses émotions, en lui apprenant à les nommer et en lui offrant des techniques pratiques, vous l’aiderez à développer des compétences essentielles pour sa vie future.
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Rappelez-vous que chaque enfant est unique. Si vous ressentez le besoin d’un accompagnement supplémentaire, n’hésitez pas à consulter un professionnel qui pourra vous guider dans cette démarche.
Ressources à Consulter
LIVRES À LIRE (POUR PARENTS)
- Parler pour que les tout-petits écoutent – Adele Faber et Elaine Mazlish.
- Émotions – La boîte à outils – Rachel Ouellet
- Le cerveau de votre enfant – Dr Daniel Siegel et Tina Payne Bryson.
LIVRES À LIRE (POUR ENFANTS)
- Bastien et les Blipoux – Faber et Mazlish (pour les 4-5 ans)
- Le Petit Volcan de Sam – Zeina El-Chaar
- La Couleur des émotions – Anna llenas
VIDÉO POUR ENFANTS
- Le Cerveau dans la Main : Cette vidéo permet aux enfants de comprendre ce qui se passe dans leur cerveau lorsque l’émotion est trop grande et qu’ils piquent une crise. Elle leur donne aussi des pistes pour apprendre à se calmer tout seuls.
INTERVENTIONS RECOMMANDÉES
- Entraînement à la gestion des émotions
Souvent proposé en groupe, il apprend à l’enfant à mieux identifier et réguler ses émotions, mais aussi à mieux interagir avec ses pairs.
- Psychoéducation ou Éducation spécialisée
Aide l’enfant à prendre conscience de ses émotions, à verbaliser celles-ci mais aussi à comprendre ses besoins pour mieux ajuster ses comportements. Des séances de guidance parentale auprès des parents sont réalisées en parallèle pour soutenir les interventions du quotidien.
- Neuropsychologue
Lorsque la situation devient trop difficile et que ces comportements ont des répercussions sur la qualité de vie de l’enfant et de sa famille ou encore ses relations sociales, il peut être souhaitable de procéder à une évaluation neuropsychologique. Celle-ci va permettre d’établir un profil complet de l’enfant pour mieux le comprendre dans son ensemble et déterminer l’origine de ses difficultés.
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Article écrit par
Elodie Authier (Neuropsychologue)
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